Paris Fashion Week, la nouvelle muse est la mode durable

Si l’art ou la créativité sont l’écho de l’époque que nous traversons, ne devrions-nous pas nous interroger sur l’intérêt croissant pour une mode alternative?

Celle qui amène à penser différemment, avec une vision intrinsèque basée sur la conscience et la durabilité? Je suis heureuse de constater que les buzzwords viraux du moment sont Upcycling, Sustainability / Durabilité, Artisanat, Production locale.
C’est cool mais c’est aussi une position sociale et politique risquée dans cette industrie , mais qui mérite d’être prise.

Les groupes du luxe et les marques travaillent maintenant à rendre l’industrie plus sensible et respectueuse de l’environnement. L’industrie du luxe est particulièrement responsable de la diffusion de la culture de cette mode consciente, car elle définit les tendances, innove et recherche le «what’s coming next», et les consommateurs les scrutent scrupuleusement.
Le marché évolue également parce que les clients questionnent tout et exigent plus de transparence, de respect des travailleurs et de l’environnement. Les designers s’intéressent de plus en plus aux tissus recyclés et tissus alternatifs fabriqués à partir de matériaux inhabituels, à l’artisanat et aux savoir-faire locaux rares.

Des jeunes créateurs «à suivre de prêt» aux grandes maisons emblématiques, le paysage actuel de la mode façonne son avenir avec une nouvelle ère créative dont la muse est … la conscience.
La créativité c’est être en phase avec son temps!
Les dernières Fashion Week Homme et Femmes de Paris (et Londres) illustrent ce changement vertueux, je vous laisse découvrir ma sélection de créateurs aux initiatives brillantes et avant-gardistes.

La philosophie fondatrice de JW Anderson: l’artisanat

Le designer défendla mode durable, selon lui, elle  n’est pas une tendance, elle continuera, car l’industrie du design s’efforce d’être plus consciente et les consommateurs commencent à privilégier les objets faits pour durer, plutôt que jetables.

Nous commençons à devenir plus moraux en tant que consommateurs, donc je pense que l’artisanat deviendra fondamental

Selon le créateur  et fondateur du Loewe Craft Prize, l’artisanat connait actuellement un énorme regain de popularité, en réaction à la domination des téléphones portables et autres appareils numériques.
Une réaction contre la «non-réalité» des technologies numériques a conduit à un intérêt accru pour le fait-main, selon Jonathan Anderson.
Une autre approche dévoile sa position du développement durable dans la mode: sa volonté de ralentir le rythme de la mode. En présentant à la fois les collections  femmes et  hommes, il espère simplifier les choses pour le consommateur et il trouve évident de brouiller les frontières entre les sexes dans les vêtements.
En outre, son prix Loewe Craft vise à donner une voix à la jeune création, une façon de préparer une industrie meilleure et plus intelligente pour et avec les générations futures.
Son optimisme se lit dans les imprimés et accessoires de la collection A/W18 dévoilée lors de la dernière Fashion Week de Londres.
 

Marine Serre, lauréate du prix LVMH, nous honore de son tout premier défilé avec l’Upcycling comme valeur fondatrice

Marine Serre a remporté le prix LVMH en juin 2017 et vient de mettre en scène sa première collection au calendrier officiel de la fashion week de Paris (collection automne / hiver 18), intitulée Manic Soul Machine.
Elle a affirmé son engagement en faveur de l’Upcycling et son approche durable de la création. Son défilé présentait des robes faites de foulards en soie vintage ou de vieilles chemises et combinaisons récupérés et retravaillés sous une couture plus contemporaine et plus « couture ».
Chaque pièce est unique, non seulement sur le podium, mais aussi en magasin: elle a formé ses équipes à l’identification des tissus et matériaux « éligibles » au recyclage. En mettant la durabilité et le modèle circulaire comme fondement de sa collection, Marine Serre interroge l’industrie et les autres designers sur leurs propres méthodes de fabrication.

C’est le genre d’approche avant-gardiste via la durabilité que nous réclamons. Pour nous, l’éthique et les valeurs sociales sont extrêmement importantes, et cela signifie aussi que personne ne peut copier mes créations .
 

L’esprit de Marine Serre absorbe et combine les codes de mondes radicalement différents tout en choisissant d’ignorer les frontières entre le prêt-à-porter, la couture, la couture et le sportswear.

AGNÈS B. HOMME :  activiste des savoir-faire locaux

Pour l’hiver 2018, agnès b. exhorte les hommes à oser, elle prône la fidélité à ses valeurs, comme elle les affirme depuis ses débuts : fidèle à la simplicité dont elle fait l’éloge et que l’on retrouve dans les modèles de cette collection. Simples en apparence, mais la minutie, le travail du détail et des matières relèvent de la haute couture. Agnès b. continue de défendre les savoir-faire Made in France, avec des étoffes comme le kabik aux nombreuses vertus, qui surtout gagne en charme avec le temps, les mailles de chez Royal Mer…

Militante écologiste, activiste dans divers engagements humanitaires, en mai 68, agnès b. ne s’est pas contentée d’écouter la radio, elle a profondément participé à cette révolution étudiante qui continue d’inspirer les contours et l’âme de ses collections.
On le décrypte dans ces quelques modèles de la collection Hommes de l’hiver 2018, présentés lors de la dernière Paris Fashion Week.

NïUKU: la jeune garde talentueuse reflète la réalité des questions environnementales

 
Le jeune label «à surveiller» n’est pas eco-fashion par tendance, c’est un processus de création logique. Ils ont compris que les podiums et la rue exigent simplicité et cohérence: entre couture et culture urbaine, les silhouettes sont intemporelles, interchangeables et androgynes! … Per-fect!
La collection présentée lors de la dernière Men Paris Fashion Week (A/W18-19) est un mélange tout en justesse de vieux vêtements coupés et retravaillés pour former des propositions contemporaines.

Leur philosophie artistique ? L’Upcycling … en effet Lenny, un des fondateurs est un collectionneur de pièces vintage rares, la seconde, Kadjahdjah, plutôt une fervente philosophe pleine de bon sens, et enfin, Riad, la troisième tête pensante, est convaincu d’un modèle économique respectant la principes du développement durable.

 
On ne peut plus rien créer de nouveau. Tout a déjà été inventé! Nous ne faisons que réinterpréter, redonner une âme aux créations déjà vivantes, tout en limitant la consommation en créant sur les stocks existants, explique Kadjahdjah Diallo.

A partir de stocks vintage, Lenny et Riad créent toute une collection de modèles qu’ils redéfinissent, repensent et recyclent.

 
Il y a déjà tellement de vêtements, nous voulions montrer qu’avec l’ancien nous pouvons faire quelque chose de nouveau, et qu’il est possible d’être créatif, de s’adapter à l’époque tout en respectant l’environnement.

Henrik Vibskov : plus conceptuel que littéral

Henrik Vibskov interroge principalement le geste poétique de mesurer quelque chose de non-mesurable (inspiré par l’œuvre d’art de Jan Fabre, L’homme qui mesure les nuages).

Mais il veut également  faire une pause pour questionner cette folie des chiffres et, entre autres réflexions, se demander comment l’environnement change et comment il nous impacte : si nous voulons changer ce que nous jugeons prioritaires, ne devrions-nous pas changer ce que nous mesurons ?

La collection reflète cette thématique de diverses manières : des clins d’œils à des petits travailleurs essayant d’analyser le monde qui les entoure, certains des vêtements sont développés à partir des pièces de collections précédentes, ont été cousues ensemble dans des échelles nouvelles et des mesures originales que le créateur s’amuse à échanger.Une performance artistique majestueuse!

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